Les trois démarches TLS (Théorie des Contraintes, Lean et SixSigma) se distinguent entre elles par la distribution des rôles et le degré de participation qu’elles autorisent ou promeuvent.
Théorie des Contraintes
La Théorie des Contraintes est essentiellement portée par des experts, des Jonah ou Jonah de Jonah en référence à l’un des personnages clé du roman "le but". Un Jonah est un coach qui utilise la méthode de questionnement dite « socratique » pour amener son coaché à découvrir par lui-même problèmes et solutions.
Les experts de la ToC, Jonah ou non, sont en mesure d’analyser un processus, de cibler la contrainte et d’appliquer les mesures propres à l’exploiter puis à l’élever. Ces experts doivent convaincre les décideurs au plus haut niveau, car les changements à opérer dans la logique ToC ne sont pas mineures et demeurent rarement localisées à un périmètre restreint.
La ToC est une démarche d’expert qui n’a guère eu besoin ni de soin particulier à développer la participation des opérationnels. Tout au plus faut-il faire de la pédagogie pour s’assurer que les nouvelles règles soient comprises et suivies.
Lean
Des trois démarches, Lean a la plus longue histoire. Héritier du Taylorisme-Fordisme qui scindent strictement les rôles entre ceux qui « pensent » le travail et ceux qui l’exécutent, le Toyota Production System est devenue une démarche participative. Cette évolution est probablement liée à la reconnaissance de la valeur des contributions des opérateurs et aux habitudes culturelles japonaises qui privilégient le groupe à l’individu.
Les experts Lean sont appelés Sensei, un nom qui désigne celui qui sait, qui a acquis une expérience, parfois traduit par professeur ou maitre. Les Sensei agissent à la manière des Jonah de la ToC, ils identifient des problèmes ou points d’amélioration que leurs « disciples » doivent étudier pour en trouver les causes racines et les remèdes.
Les groupes de travail pluridisciplinaires travaillent à résoudre des problèmes et à améliorer. Cet aspect participatif et ses bénéfices sont probablement à citer parmi les causes de la popularité de Lean. La riche boite à outils associée à Lean et leur facilité d’emploi les rend accessible au plus grand nombre, sans qu’il faille nécessairement l’aide d’un expert.
Six Sigma
Six Sigma est un approfondissement de la maitrise statistique des procédés (MSP ou SPC pour l’acronyme anglais) en vogue dans les années (1975-1985 ?), fondée sur l’emploi des outils mathématiques statistiques.
Par essence, Six Sigma est une démarche portée par des experts qui maitrisent ces outils mathématiques. Pour démultiplier les projets et assurer leur suivi, plutôt que de chercher à multiplier des experts, on a multiplié des assistants qui se répartissent selon leurs connaissances et maitrise des outils mathématiques. Les distinctions se font au travers de grades appelés « ceintures » dont la logique est inspirée des arts martiaux ; ceinture noire, verte, blanche…
Six Sigma ouvre la participation aux non-matheux, généralement ceintures blanches ou jaunes, qui s’occupent de préparer et récolter les données pour les analyses par les experts, puis de suivre la mise en œuvre des solutions. Ils sont généralement encadrés par des animateurs de grade plus élevés ; ceintures vertes ou bleues.
Des outils simples, anciens pour la plupart et déjà connus et intégrés dans Lean ou ToC, permettent des contributions non-mathématiques : description de processus à l’aide de SIPOC, identification des critères critiques pour la qualité (CTQ), suivi des étapes du DMAIC, analyse est/n’est pas, etc.
La stratification en grades redonne une dimension experte à cette démarche partiellement participative.
TLS
On peut voir en chacune des démarches des forces et des faiblesses. Classiquement les affiliés à l’une ou à l’autre « démontrent » que leur approche favorite couvre l’ensemble des besoins et peut se passer des deux autres. Sans chercher à alimenter un débat généralement plus passionnel que rationnel, le constat précédent permet d’émettre un doute quant à la « complétude » et à la qualité de panacée de chacune d’elles.
L’utilisation synergétique des trois démarches, désignée sous le sigle TLS, permettrait de profiter de tous les avantages de chacune d’elles en termes d’expertises et de participation.
Comme les promoteurs de TLS le vantent, ToC permet de focaliser sur les limitations (contraintes) et de déterminer où se trouve l’effet de levier le plus important. Lean permet d’assainir et alléger un processus alourdi par les gaspillages et tâches à non-valeur ajoutée, tandis que Six Sigma permet de résoudre les problèmes typiques de maitrise des procédés grâce à l’étude des données chiffrées.
C’est une sorte de trithérapie qui permet de mieux couvrir le spectre des besoins et d’aller plus loin dans l’amélioration continue.
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