Parmi les événements qui pénalisent le plus la performance productive des machines se trouve la durée et la fréquence des changements de séries. Celles-ci sont nécessaires pour garantir la flexibilité et la fluidité du système face aux fluctuations des demandes. Aborder les changements de séries sans méthode, c'est s'exposer à perdre un temps précieux, surtout si le changement concerne la machine goulot.
Le SMED est une méthode d’organisation qui cherche à réduire de façon systématique le temps de changement de série, avec un objectif quantifié.
(norme AFNOR NF X50-310)
Au sommaire
- Les changements fréquents sont nécessaires
- Un changement de... quoi ?
- Les bornes de mesure de la durée d'un changement
- Un acronyme qui prête à confusion
- Les bases de SMED
Les changements fréquents sont nécessaires
Lorsque plusieurs productions différentes empruntent les mêmes ressources (machines), elles se succèdent généralement en trains de séries homogènes. On évoque également le terme de "campagnes" pour désigner la succession de productions.
Le schéma ci-dessous représente le "film" de production tel que le verra une machine déterminée. D'abord c'est la référence 1 qui est produite, puis la machine est mise à l'arrêt pour la préparer à produire la référence 2. Chaque intervalle rouge figure la durée d'un changement d'une production à une production différente.
Bien évidemment, un changement n'impacte la productivité de la machine que s'il est nécessaire d'arrêter la machine pour effectuer le changement. Plus les changements sont longs et/ou fréquents, plus la capacité productive de la machine est diminuée.
La tentation est grande de minimiser les changements afin de ne pas perturber la production. Or cette stratégie, même justifiée par de pseudo "tailles de lots économiques", n'est plus envisageable car elle nécessite des stocks plus importants pour compenser la moindre souplesse. Le temps de traversée des produits est plus long, ce qui globalement coûte plus cher (coût de possession, time-to-cash rallongé) et comporte des risques qualité, notamment la découverte tardive de défauts.
Les changements fréquents sont nécessaires car ils permettent de répondre de manière réactive et plus économique aux variations de demandes.
Un changement de... quoi ?
Selon les secteurs d'activité le vocabulaire varie. En manufacturing on va plutôt évoquer des changement de séries, dans la plasturgie on change d'outil, car c'est essentiellement lui qui conditionne la production. Dans les industries agroalimentaires, la fabrication de colles et autres production à base de mélanges se sont plutôt des changement de recettes. La chimie, la pharmacie ou l'industrie des cosmétiques recourent à des changements de formulation et l'imprimerie est sur du changement de format, tout comme les unités de conditionnement.
Toutes ces expressions sont synonymes au sens du SMED, il faut travailler à réduire le temps d'arrêt des machines ou du procédés durant les changements.
Besoin d'exemple simple ? lisez SMED expliqué en faisant la lessive
Un acronyme qui prête à confusion
Single Minute Exchange of Die se traduit par "Echange d'outil en moins de 10 minutes". Le terme "Single Minute" que l'on traduirait avec raison en "une minute" est sujet de confusion. En fait c'est une maladresse des pères japonais de cet acronyme qui voulaient indiquer que le temps de changement doit se mesurer sur un seul digit, soit avec les chiffres de 0 à 9 et par conséquent en moins de 10 minutes.
La maladresse peut être vertueuse, car pourquoi ne pas viser réellement le "single minute" (la seule minute), voire l'OTED qui est l'acronyme pour désigner On Touch Exchange of Die ou l'échange instantané d'outil par simple effleurement...
Les bases de SMED
Deux notions fondamentales
On distingue deux types d'opérations : les opérations internes, qui ne peuvent être exécutées que si la machine est arrêtée et les opérations externes qui peuvent être exécutées machine en marche, sans arrêter la machine.
Typiquement, les opérations internes concernent des réglages ou changements sur des organes en mouvement ou proches d'organes en mouvement, alors que les opérations externes se font hors du champ de la machine, tel que remplir un formulaire, préparer un montage, etc. Ce dernier type d'opérations ne nécessite pas d'arrêter la machine, mais le manque d'organisation rationnelle fait que bien souvent ces opérations externes se font en maintenant la machine arrêtée.
La méthodologie SMED prévoit logiquement de minimiser les opérations internes et maximiser les opérations externes. Le passage d'une opération interne en opération externe est appelé "conversion".
Les tâches inutiles
Avant de se lancer dans un effort de conversion, il est nécessaire de procéder à l'inventaire exhaustif des tâches nécessaires au changement. Une fois cet inventaire effectué, une analyse critique doit déterminer quelles tâches sont réellement nécessaires et celles qui sont inutiles. Ces dernières sont éventuellement des reliquats d'actions mises en place par le passé (contremesures, précautions, etc.) dont les causes qui leur ont donné naissance ont disparu, mais ces tâches sont restées dans les modes opératoires. Il va de soi que le premier gain de temps et d'énergie consiste à éliminer les tâches inutiles.
Modes opératoires
L'existence de standards, sous forme de modes opératoires par exemple est un autre prérequis à une analyse des tâches. En l'absence de tels standards, chaque intervenant (personnel opérateur, régleur...) pourra procéder selon ses préférences et (bonnes ou mauvaises) habitudes. En l'absence de mode opératoire ou de procédure standard, l'observation d'un changement risque de ne pas être significatif.
En l'absence de standard, il est recommandé de fixer une des manières de procéder comme tel, de demander à chaque personne de s'y conformer, avant de la faire évoluer si cela se montre nécessaire ou pertinent.
Organisation versus solutions techniques
Les opérationnels découvrant SMED ont tendance à mettre leur créativité au service de solutions techniques ou technologiques, qui opèrent une sorte d'irrépressible attraction. L'expérience montre pourtant que c'est en revisitant l'organisation d'un changement que l'on découvre les leviers les plus importants. Il s'agit de ne pas se tromper de cible et résister à l'appel des solutions techniques. C'est ce que cherche à illustrer la vidéo suivante.
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