On appelle “effet tunnel” une période durant laquelle le donneur d’ordres ou l’émetteur des spécifications reste aveugle quant à la progression du projet et/ou du développement, tandis que les personnels chargés du projet et/ou du développement sont affairés de leur côté, sans fournir d’indications chemin faisant.
Durant le passage dans le tunnel, il n’y a pas d’autre solution que d’attendre qu’un jalon soit atteint ou qu’une tâche soit achevée pour pouvoir évaluer ce qui a été fait.
Tout comme lors d’un passage dans un tunnel routier dans lequel il fait sombre, la sortie provoque un éblouissement par l’afflux soudain de lumière. Le terme “éblouissement” évoque aussi bien cet afflux soudain d’informations que l’éventuelle heureuse surprise en découvrant avec ravissement ce qui a été produit.
Hélas, cette dernière hypothèse est (très) peu fréquente. L’effet tunnel est plutôt connoté négativement. De fait, dans le contexte d’un développement avec effet tunnel, l’éblouissement est plus souvent une avalanche de déconvenues, d’écarts entre les spécifications et la réalisation, des malentendus, etc.
Les principaux problèmes liés à l’effet tunnel sont les suivants :
- Aucune visibilité sur la progression vs le planning : les parties prenantes externes au travail en cours ne peuvent se rendre compte d’une dérive éventuelle, ni du maintien de l’alignement effectif de la progression des travaux avec la trajectoire prévue.
- L’absence de visibilité ne permet pas d’être alerté précocement en cas de dérive et donc de manager les retards sur l’ensemble du projet ou de mettre en place des contre-mesures pour rattraper les dérives ou limiter leurs effets.
- Plus le “tunnel” est long, plus le risque que les spécifications évoluent durant la traversée du tunnel augmente, sans que les développeurs puissent en prendre connaissance et adapter leurs travaux.
- Il est difficile de gérer dynamiquement les affectations de tâches et les ressources.
L’évaluation des progrès et achèvements à la sortie du tunnel est binaire ; c’est conforme et à l’heure ou non. Selon l’impact sur le projet, un travail incomplet et/ou qui ne répond pas complètement aux spécifications sera néanmoins validé par défaut, par exception, par dérogation etc. ou il faudra tout recommencer. Dans ce dernier cas, cela peut se faire aux dépends du prestataire, qui de plus peut se voir réclamer des pénalités de retard ou pour non-conformités.
La sortie du tunnel peut également révéler un malentendu entre l’émetteur des exigences et ceux qui sont sensés y répondre. A l’entrée du tunnel, les deux parties étaient convaincues de se comprendre, la sortie prouve le contraire. Durant la traversé du tunnel, aucun indice, aucune réunion de coordination n’a pu servir d’alerte précoce. Le temps de traversée du tunnel est donc du temps (et des ressources !) gaspillé à chaque fois que le résultat à la sortie n’est pas satisfaisant.
Ce phénomène est suffisamment fréquent pour que l’effet tunnel soit redouté et supposé toujours finir en problèmes à traiter.
Le désintérêt de sponsors ou de parties prenantes
Un autre risque induit par l’effet tunnel réside dans le désintérêt des sponsors ou des parties prenantes durant la période “d’invisibilité”. Le manque de visibilité sur une trop longue période “tue” l’intérêt d’un projet auprès des sponsors, éventuellement mobilisés sur un autre. Il peut en aller de même pour les acteurs du projet qui, attendant leur tour de contribuer ou un livrable, se se lassent et se désintéressent.
Au pire cela peut arriver aux “clients”, aux commanditaires qui oublient ou se désintéressent d’un projet qu’ils ont initié, du fait de la longue période sans visibilité ni nouvelles.
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