Les structures V, A, T (rappel)
Les pionniers de la théorie des contraintes ont rapidement décrit les problèmes classiques que rencontrent certains types d'organisation ou typologies d'entreprises. La connaissance préalable des trois types de base peut orienter efficacement la recherche des contraintes et la définition des actions d'amélioration*.
On distingue trois types d'organisation génériques symbolisées par les lettres V, A et T.
Ces lettres symboliques représentent le processus dans lequel on injecte la matière première à son pied et l'on récupère les produits finis en haut, plus largement les input sont à la base, les output au sommet.
Structures en T
Les entreprises de type T se caractérisent par un large éventail de produits finis obtenus par une personnalisation tardive de sous-ensembles. Pour répondre rapidement et à bon prix à la demande croissante de produits différenciés, des entreprises d'assemblage en A, ont muté en structure T. Les sous-ensembles communs sont produits en masse, sur prévisions, et les personnalisations sont faites à la commande, par choix d'options ou par des opérations spécifiques.
L'explosion des nombres de références dans la barre du T est obtenu en combinant un nombre relativement modeste de sous-ensembles :
Exemple : un produit est proposé en 4 types de boîtiers différents, avec 4 couleurs différentes au choix et 4 options de puissance, ce qui donne 64 combinaisons possibles (4x4x4) tout en ne gérant que 12 sous-ensembles (4+4+4).
Ce genre d'entreprise se trouve dans l'automobile, l'électroménager, la hi-fi, les meubles, machines de bureau, machines-outils...
Problèmes traditionnels des structures en T
Les structures en T connaissent souvent des problèmes analogues aux structures en A. Toutefois les deux structures différent en cela que dans un type A l'assemblage est un point de convergence, tandis que dans un type T, l'assemblage est un point de divergence, alimentant la barre du T.
Par ailleurs, dans le type A les sous-ensembles sont généralement spécifiques aux modèles finis, alors que le type T se caractérise par une forte communauté des sous-ensembles. Afin d'éviter les confusions entre les structures en T et certaines structures mixtes, nous retiendrons comme définition que dans le pied du T on ne trouve pas de point de divergence ni d'assemblage. Les différents sous-ensembles sont achetés ou produits dans le pied, mais sans se rencontrer avant l'assemblage final.
Ainsi, dans le type T, les risques de mauvaises allocations touchent les sous-ensembles, plutôt que les ressources. Les nomenclatures complexes et les "similitudes" entre produits finis conduisent à des erreurs.
Comme pour les structures en A, le recours aux regroupements de lots ou les politiques de lots économiques retardent certains sous-ensembles, l'assemblage est souvent à court de pièces, malgré les stocks et en-cours importants. L'efficacité est médiocre et les recours aux heures supplémentaires courants. Les coûts de production sont élevés.
On y connaît les vagues de travail et pour se trouver de l'occupation, l'assemblage final pratique le "vol" de pièces, les réaffectations plus ou moins sauvages, et parfois la cannibalisation, qui consiste à démonter des sous-ensembles d'un type de produits pour les monter sur d'autres. Une bonne partie des références sont souvent en avance sur le plan, alors que d'autres sont souvent en retard.
Bien que l'important stock de produits finis devrait fournir rapidement toute demande, ce n'est pas toujours le cas dans la mesure où les mixes désirés par les clients ne sont pas disponibles.
La base, ou pied du T qui prépare les sous-ensembles et la barre du T qui les assemble sont souvent considérées et gérées comme deux entités distinctes.
Stratégie conventionnelle
L'effort porte en général sur l'amélioration du service client, c'est à dire les délais de mise à disposition. Les produits en stock ne satisfaisant pas toujours les demandes, on cherche à améliorer les prévisions, à prédire les tendances.
Un autre axe d'amélioration est la maîtrise des coûts. La cible sont les heures supplémentaires et les éléments non productifs, comme les changements de séries. Comme pour les structures en A, la parcimonie d'attribution d'excédents de main d'oeuvre et les regroupements des lots amènent un effet exactement inverse à celui recherché, accentuant les vagues de travail.
Théorie des Contraintes face aux entreprises de types T
Le problème ici est moins le débit que le respect des délais. Dans un premier temps il faut s'assurer que les problèmes rencontrés sur le terrain ne proviennent pas de causes externes, par exemple une erreur dans une nomenclature ou des prévisions erronées. Ensuite, la synchronisation de l'activité est nécessaire pour casser les habitudes de "vol" et réaffectation des pièces. Un effort d'information doit être fait auprès du personnel pour le sensibiliser aux conséquences de telles pratiques.
L'identification des "goulots" se fera de manière similaire à celle des structures en A; partir des manquants et retards et trouver la/les ressource(s) commune(s).
Les structures en T ont peu de vrais goulots, car s'il y en avait plusieurs, de nombreux sous-ensembles seraient en retard et des mesures auraient déjà été prises. Précisément à cause de cela, les structures en T n'ont souvent même pas de vrais CCR.
Il est plus simple de considérer le T comme deux entités distinctes, ce qui est le plus souvent déjà fait, instinctivement ;
- La fabrication (le pied du T) qui fabriquera pour le stock, avec comme seul client le magasin de stockage des sous-ensembles,
- l'assemblage (la barre du T) qui assemble à la demande du client final.
Stocker des sous-ensembles est préférable à stocker des produits finis, pour deux raisons :
- Les sous-ensembles sont réaffectables, ils gardent une grande flexibilité d'emploi, à l'inverse des produits finis qui ont été personnalisés.
- Les temps de cycle à l'assemblage final sont très inférieurs à ceux de la fabrication des sous-ensembles, on peut donc réduire les stocks de produits finis en gardant la possibilité de répondre rapidement aux demandes des clients.
Cette caractéristique sera mise à profit pour positionner les stocks de protection (buffer).
Si un indicateur utilisé, un objectif, focalise sur le nombre d'unités en sortie, il faut s'assurer que celui-ci tienne compte du mixe des produits. Un indicateur ne tenant compte que du nombre d'unités, sans vérifier que les mix sont appropriés à la demande des clients, conduirait à des effets pervers de suractivation de ressources. Il faut choisir un indicateur de "satisfaction client" à la place d'un indicateur purement quantitatif.
Bibliographie
- "Synchronous Manufacturing: Principles for World Class Excellence", M. Michael Umble & Mokshagundam L. Srikanth
- "Le Management par les contraintes en gestion industrielle. Trouver le bon déséquilibre", Philip Marris
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