Les structures V, A, T (rappel)
Les pionniers de la théorie des contraintes ont rapidement décrit les problèmes classiques que rencontrent certains types d'organisation ou typologies d'entreprises. La connaissance préalable des trois types de base peut orienter efficacement la recherche des contraintes et la définition des actions d'amélioration*.
On distingue trois types d'organisation génériques symbolisées par les lettres V, A et T.
Ces lettres symboliques représentent le processus dans lequel on injecte la matière première à son pied et l'on récupère les produits finis en haut, plus largement les input sont à la base, les output au sommet.
Structures en A
Dans les structures en A un nombre important de matériaux, de pièces, de composants, voire de systèmes, conduit à un éventail relativement restreint de produits finis. Ce sont typiquement les industries d'assemblage, tels que l'industrie automobile, aéronautique, les constructions d'ouvrages du génie civil.
Problèmes traditionnels des structures en A
L'implantation des ateliers est (était ?) fréquemment de type "job shop", où se regroupent les ressources par type d'opérations. Ceci notamment dans les cas où les fabrications ne sont pas assez répétitives pour pouvoir créer des lignes ou cellules de ressources regroupées par "ligne de produit". La logistique interne est de ce fait assez complexe, il y a de nombreux en-cours partout et beaucoup de temps est perdu en manutentions entre les différentes ressources et stades de fabrication.
Les taux d'utilisation machine et main d'oeuvre sont faibles, les surcharges sporadiques s'absorbent grâce au recours aux heures supplémentaires. Ces alternances de travail et d'attente sont souvent désignés sous le terme de "vagues" de travail.
A l'inverse des entreprises structurées en V où l'on risque de mal affecter la matière, dans les entreprises structurées en A ce sont les ressources qui sont souvent mal affectées, par des regroupements de lots ou le recours aux lots économiques. Ceci entraine couramment :
- L'assemblage souvent à cours de pièces, malgré le niveau des stocks et en-cours
- L'assemblage assemble ce qu'il peut, en fonction des pièces disponibles plutôt qu'en fonction du planning
- Le taux de respect des délais est médiocre. A l'approche des dates de livraison, les "chasseurs de pièces" entrent en action pour dénicher les pièces manquantes, bloquées dans le processus. Leur intervention, ainsi que les vagues qui déplacent sans cesse les encours, font croire à l'existence de goulots baladeurs qui se promènent tout au long du processus.
- L'efficacité médiocre et les recours aux heures supplémentaires font croître les coûts de production. Le processus, qui ne se comporte jamais comme planifié, semble incontrôlable.
Stratégie conventionnelle
Les décisions conventionnelles visent à reprendre le contrôle du processus et à réduire les coûts unitaires. La recherche de la réduction des coûts amène la régulation des heures supplémentaires. Les circuits et délais d'approbation pour obtenir l'autorisation créent des retards supplémentaires. La main d'oeuvre est jugée excessive (au vu des coûts et de la productivité) et on cherche en général à la réduire. Or, la recherche combinée de meilleurs coûts et productivité a éventuellement placé plus de machines que de main d'oeuvre dans les ateliers. Logiquement, ce sont des machines très performantes et très automatisées, qui débitent plus que le besoin, surtout si l'on cherche à les rentabiliser rapidement. La main d'oeuvre raréfiée est affectée avec une logique de lot économique, c'est à dire que l'on affecte le personnel quand le travail sur une machine en vaut la peine. Au final, le phénomène de vagues est amplifié. La recherche d'un meilleur contrôle des opérations amène fréquemment l'informatisation du problème.
Théorie des Contraintes face aux entreprises de types A
Phase 1, assainir l'existant
Le problème principal sont les encours pléthoriques qui encombrent les ateliers, coûtent chers et surtout masquent les vrais problèmes.
L'étude des stocks ne donnera rien, tant ils sont dispersés et importants, il vaut mieux inverser la logique et chercher les manquants pour identifier les ressources contraintes.
Le point de convergence que forme l'assemblage final est un bon endroit pour observer ce qui y arrive. On devrait constater des manquants et des excédents chroniques.
En recoupant ces deux listes il doit apparaître des ressources (suspectes) qui sont utilisées pour fabriquer les pièces manquantes mais pas celles en excédent.
Dans l'exemple ci-contre, les sous-ensembles
B sont des manquants chroniques, D sont souvent en retard, tous les autres en avance. Le point commun entre B et D est la ressource R5. Afin de simplifier le problème, il faut obtenir que ne soit fabriqué que ce qui va être assemblé, en réduisant la taille des lots de fabrication et transfert. En abaissant le niveau des stocks, on fera apparaître les vrais problèmes, tels les rochers dans l'analogie de la rivière.
Lorsque cela est obtenu, il ne devrait subsister que des vrais goulots, restant fixes.
Phase 2, pérenniser
Pour maximiser le Throughput, l'assemblage final sera planifié à sa capacité maximale et les goulots seront ordonnancés en conséquence.
Les ressources non-goulot verront leurs excédents de capacité convertis en changements de séries supplémentaires, afin que la taille des lots reste faible et que ces ressources restent flexibles.
Des stocks de protection judicieusement dimensionnés protégeront les CCR, mais aussi l'assemblage final. En effet, vu le grand nombre de composants nécessaires à l'assemblage, certains d'entre eux peuvent être retardés. Protéger l'activité d'assemblage c'est protéger les délais d'achèvement.
Bibliographie
- "Synchronous Manufacturing: Principles for World Class Excellence", M. Michael Umble & Mokshagundam L. Srikanth
- "Le Management par les contraintes en gestion industrielle. Trouver le bon déséquilibre", Philip Marris
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