Christian HOHMANN

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En quoi Lean a échoué selon Jim Womack


Figure emblématique de la communauté Lean, Jim Womack a publié une réflexion sincère et critique (hansei) sur les échecs de lean et pourquoi ne pas abandonner. J'ai été sincèrement impressionné à la lecture de cet article, qui a par ailleurs renforcé mon respect et mon admiration pour l'auteur. 

Vous pouvez lire la publication datée du 29 août 2017 sur la planet Lean (http://planet-lean.com/jim-womack-on-where-lean-has-failed-and-why-not-to-give-up)

En quoi lean a échoué

L'échec est, selon Jim Womack, pluriel :

  • L’échec de voir des grandes entreprises se transformer en embrassant Lean et de ne pas voir un “autre Toyota” émerger.
  • L’échec de la relocalisation des opérations en dépit de la preuve rationnelle que les entreprises gagneraient à fabriquer au plus près au lieu de chercher des coûts de main-d'œuvre plus bas.
  • L’échec du désintérêt croissant des travailleurs pour une approche qui devait leur faciliter le travail ainsi que l'acceptation croissante du status quo, des choses telles qu'elles sont, au sein de la communauté de Lean elle-même.

Après tout l'enthousiasme, le “hype”, l'espoir suscité et les succès de Lean, ce constat doit être amer pour l’inlassable promoteur du Lean qu’est Jim Womack depuis tant d’années.

Je suis impressionné par son courage de reconnaître cette situation avec clairvoyance et de partager son analyse ouvertement.

Bien des Leaders dans une position analogue nieraient la situation, la passeraient sous silence, leur ego ne leur permettant pas de reconnaître l'échec. Non seulement Jim Womack a ce courage, mais refuse d’alimenter un “muda de déni” et d'abandonner le But qu’il s’est fixé.

Ce que je constate de ma fenêtre européenne (principalement en France) et toutes proportions gardées, est conforme à l'analyse de Jim Womack. Le nombre de Lean managers et de responsables amélioration continue en poste dans les entreprises a fortement augmenté au cours des dernières années. Pour autant, aucune entreprise ne se distingue ni n’attire l'attention par une amélioration drastique de ses performances.

En outre, lorsque nous (consultants) sommes invités à apporter soutien et assistance dans les entreprises, je suis le plus souvent surpris par les compétences et le pouvoir d’influence très limités de ces personnes en charge de l'amélioration continue ou de l’excellence opérationnelle.

Un fait qui est également rapporté par Karen Martin dans une publication sur Lean Edge https: //www.theleanedge.org/256088-karen-martin-technical-proficiency-and-leadership-acumen-can-you-nail-the-problem-statement-first-time-right/

Mon constat et convergent avec celui de Jim Womack : "faire Lean" est souvent réduit à animer de petits ateliers kaizen ici et là, sans cohérence ni lien avec une intention stratégique. Il s'agit de pallier aux problèmes de processus défaillants, de résoudre des problèmes locaux ou encore de partir à la chasse aux gaspillages de manière opportuniste.

Cela occupe et justifie l’existence de la couche supplémentaire de la bureaucratie "Lean", qui trop souvent profite d’une grande complaisance quant à ses résultats. Ceux-ci sont le plus souvent qualitatifs et très locaux, sans impact mesurable au niveau du business.

C’est ainsi qu’une fois qu’un chantier 5S a fait une passe sur les 3 premiers, certains responsables n’hésitent pas à clamer qu’ils ont terminé, qu’ils sont “arrivés” voire qu’ils sont "Lean" maintenant. C'est à ceci que le Lean banalisé ressemble trop souvent.

A propos de l’échec de l’ambition de transformer les entreprises grâce au Lean, il me semble que Jim Womack et d’autres ont bien expliqué, avec rationalité, l’impérieuse nécessité de changer.

Dans la version originale (en anglais) de cet article, je développe mon propos autour de la matrice du changement, que je vous invite à découvrir sur mon blog (ouverture dans un nouvel onglet).

Il se pourrait néanmoins que le côté émotionnel lié à la perspective de la transformation ait été sous-estimé. Bien des décideurs sont parfaitement satisfaits avec la situation actuelle de leur organisation et ne voient pas la nécessité de changer.

Nombreux sont également les décideurs qui craignent de compromettre leur position et leur carrière en s’aventurant dans une transformation incertaine aux résultats imprévisibles. Diriger une transformation lean exige du leadership, du courage, la confiance en soi et la nécessaire liberté d'action. Peu de dirigeants répondent à tous ces critères.

Pourquoi ne pas abandonner

Malgré ce sombre tableau, Jim Womack n'est pas prêt à abandonner ni à laisser le “muda du défaitisme” sur son chemin. Si aucun autre “nouveau Toyota” n'est susceptible d'émerger, d'autres réussite peuvent être partagées, dans des entreprises de taille intermédiaire ou dans des start-up par exemple.

Reconnaissant les limites des méthodes de formation Lean mises en oeuvre jusque là, principalement à travers des chantiers et des livres, Jim appelle la communauté à réfléchir à des moyens plus efficaces de transmettre les connaissances à la génération suivante.

Le dernier paragraphe de la publication de Jim Womack sonne comme une ferme résolution de repenser les tactiques (de la communauté Lean), de conserver son But et de mieux comprendre les difficultés qui l’empêchent de rester sur la bonne voie.

J'encourage tout le monde à lire la publication originale et à consulter les commentaires.

Ma conclusion personnelle

C'est une triste lecture que celle de l’article, mais je ne peux qu'acquiescer. Je suis en empathie avec Jim Womack et le répète, suis impressionné par son courage et son humilité.

Si Lean perd de son aura, je mesure ce qu'il m’a apporté et m'apporte encore. Je pense que toute personne ayant une véritable compréhension des fondements du Lean ne peut plus raisonner autrement qu’en termes et logique du Lean Thinking. Je continuerai pour ma part à promouvoir et à utiliser tout ce qu’offre Lean au niveau personnel et professionnel, partout et chaque fois que cela est pertinent. Qu’il soit passé de mode ou non.

Ma conviction personnelle est que Lean (Thinking) continuera à influencer les individus et les organisations, mais plutôt en amont, au niveau du développement des produits et des processus.

Je pense également que la vague irrésistible de la digitalisation et de toutes les technologies de l'information autour des usines intelligentes va rebattre les cartes quant à la planification, l’organisation, les opérations et les business modèles. Autant de nouvelles opportunités pour réinventer et transformer les organisations ainsi que la philosophie, les méthodes et les outils qui doivent l’accompagner. Lean y aura sa place.



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Mise à jour le Samedi, 23 Septembre 2017 05:38  

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